La réouverture annoncée de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH), communément appelé hôpital général, le mardi 24 décembre 2024, a tourné au carnage. Au moins deux journalistes et un policier ont été tués lors d’une attaque perpétrée par des bandits. 9 autres personnes dont 7 journalistes sont sortis blessés. Sur Magik 9, le jeudi 26 décembre, Arnold Junior Pierre, l’un des journalistes ayant survécu à cette attaque est revenu sur le déroulement des faits.
« Nous avons reçu une invitation formelle pour participer à la réouverture de l’hôpital de l’Université d’État d’Haïti. C’était une invitation similaire à celle qui nous avait été adressée lors de la réouverture de la Maternité Isaïe Jeanty. Seuls la date et le lieu ont changé », a indiqué Arnold Junior Pierre, reporter de Radio Télé Galaxie à Panel Magik le jeudi 26 décembre 2024, témoin des événements qui se sont déroulés à l’HUEH le mardi 24 décembre 2024.
Quelques jours plus tôt, sur une station de radio de la capitale, le ministre de la Santé publique et de la Population, Dr Duckenson Lorthé Blema, avait promis à la population comme « cadeau » de rouvrir l’HUEH.
À son arrivée, dans les locaux de l’hôpital, Arnold Junior Pierre raconte avoir retrouvé plusieurs collègues journalistes sur place. D’autres personnes, des employés de l’hôpital et du ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP) et des membres de la population, une centaine, étaient présents à l’hôpital et dans les alentours.
Pourtant, rien n’était en place pour une réouverture, a confié Arnold Junior Pierre. C’est à l’arrivée des journalistes qu’on a débuté avec les nettoyages et la décoration, dit-il.
Côté sécurité, aucun agent des forces de l’ordre n’a été aperçu. Seul un blindé de la Police nationale d’Haïti (PNH) faisait la ronde dans les parages du Bureau national d’ethnologie et de la rue Saint-Honoré, rapporte le jeune reporter, précisant que des agents de la PNH rencontrés à proximité du Palais national en marge des événements confieront qu’ils n’ont jamais été informés formellement de cette réouverture.
« Nous avons vainement attendu près de deux heures l’arrivée des officiels. Il y a des journalistes qui sont partis face à cette longue attente », confie Arnold Junior Pierre.
Un à certain moment, Pierre dit avoir tenté de prendre en photo l’entrée de l’hôpital depuis la rue Monseigneur Guilloux quand le blindé a tenté de transmettre un signal à lui et aux autres personnes sur place. Ils n’ont pas pu décrypter le message. Le reporter de radio télé Galaxie dit avoir eu la vie sauve grâce à une dame qui l’a prévenu de l’approche des individus armés.
« Entre le signal du blindé et les premiers tirs, il s’est écoulé une vingtaine de minutes. Les tirs venaient de la rue Monseigneur Guilloux et de la rue Saint-Honoré », explique Pierre.
« J’ai chronométré que les bandits ont tiré pendant 49 secondes sans interruption », indique Arnold Junior Pierre, qui dit avoir attendu deux heures après les tirs avant que commencent les opérations visant à les aider à évacuer les locaux de l’HUEH.
Tous ceux qui étaient pris au piège au moment de l’attaque ont été secourus par des agents de l’Unité de sécurité générale du Palais national (USGPN).
L’attaque a fait trois morts : deux journalistes (Markenzy Nathou et Jimmy Jean), un policier (Daniel Renaud) et huit journalistes sont sortis blessés (Robens Pétion, Réginald Baltazar, Vélondie Miracle, Florise Deronvil, Jean-Jack Aspèges, Jocelyn Justin, Rosemond Vernet et Arnord Junior Pierre).
Une prise en charge qui laisse à désirer
Les journalistes blessés lors de l’attaque du mardi 24 décembre 2024 ont été transportés à l’Hôpital Universitaire la Paix, à Delmas 33. Pour Robest Dimanche, porte-parole du Collectif des médias en ligne (CMEL), l’invitation publique du titulaire du MSPP était « un appel à la boucherie », puisqu’aucune
disposition n’avait été prise pour assurer la sécurité de ceux qui s’y rendaient.
« Le CMEL condamne avec la plus grande rigueur l’attentat des bandits armés de “Viv ansanm” qui a coûté la vie à deux journalistes », a réagi Robest Dimanche le jeudi 26 décembre 2024 à Panel Magik. M. Dimanche appelle les autorités à prendre leur responsabilité pour la prise en charge des victimes et pour accompagner les familles des défunts.
Lors de son intervention, Robest Dimanche déplore le peu d’attention accordée dans la prise en charge des journalistes blessés et hospitalisés à l’Hôpital universitaire de la Paix. Dimanche critique le manque de diligence des autorités de l’État dans l’accompagnement des journalistes victimes.
Les attaques ne sont pas sans conséquences. Alors que le gouvernement a annoncé des initiatives pour venir en aide aux victimes, tôt ce jeudi 26 décembre, Le Nouvelliste a appris que le ministre de la Santé publique et de la Population (MSPP) a été renvoyé. C’est le ministre de la Justice et de la Sécurité publique, Patrick Pélissier, qui assume l’intérim au MSPP en attendant la nomination d’un nouveau ministre en charge du MSPP.