Le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), après le 12 avril 2024, a connu un nouveau cadre institutionnel et juridique qui aurait donné place à l’adhocratie- c’est -à -dire un fonctionnement apparenté à celui d’un groupe occasionnel, soit un questionnement implicite du principe « inamovibilité » de ses membres. Cette formule renvoie aussi à la coopérative où l’on évoque le principe de gestion par rotation. Ce qui serait idéal du point de vue d’une démocratie participative-Aussi le CPT est -il fondé sur le principe établi par la Constitution haïtienne en son premier article : » Haïti est une république indivisible, indépendante, libre, démocratique et solidaire… ».
Cependant, à d’autres niveaux ce principe est répudié du fait de se démarquer de la promotion effective des collectivités territoriales et du pouvoir local. Les juges, les membres du Conseil électoral permanente devraient être choisis dans le cadre des assemblées. La préparation du budget national et de plan de développement s’inscrit aussi dans cette logique de participation citoyenne. Tout se limite au CPT en donnant un caractère « élitiste » même à la participation. Ainsi le CPT initie une pratique de décentralisation mort-née.
En fait tout va se relever, du point de vue opérationnel. D’un Premier ministre. Car le CPT n’est pas un conseil d’administration sinon un espace d’orientation politique et stratégique. Il lui manque une culture organisationnelle pour se faire une identité dans le cadre d’une pratique de solidarité, d’égalité et de participation démocratique. Toute lutte pour l’hégémonie ou le contrôle du CPT est une antinomie à la solidarité que requiert la structure d’un conseil en soi.
Le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), créé par Décret du 12 avril 2024, Spécial No 14 paru dans le journal officiel « Le moniteur », est issu d’une formule inédite née des négociations entre des parties haïtiennes en conflit dans un contexte de vide institutionnel en absence du parlement, d’un exécutif fonctionnel et d’un pouvoir judicaire régulier et indépendant. Ce Conseil est composé de sept (7) membres avec droit de vote et de deux (2) observateurs sans droit de vote suivant l’article 1er qui fait référence au statut de
« représentants « de ces membres ; les « parties prenantes », est une deuxième notion utilisée pour les qualifier.
Les membres se sont convertis en « délégués » au regard de l’Assemblée des secteurs prévue dans le projet « d’Accord Politique Pour une Transition Pacifique et Ordonnée «, en son article 47.1. D’où un chevauchement de deux logiques :l’une représentative et l’autre participative.
En moins d’un mois de sa création le CPT a évolué dans sa structure pour tenter de palier des dissensions nées de la désignation du 30 avril dernier d’un président et garantir l’appropriation du principe du fonctionnement par consensus. En effet, dans une résolution signée par les membres du CPT, il a été décidé officiellement d’adopter au sein du Conseil une présidence tournante de quatre conseillers et faire passer la majorité décisionnelle de 4 voix sur 7 à 5/7.
Aussi l’organigramme dessiné serait-il de type matriciel à la croisée des fonctions, des activités, des chantiers et des responsabilités dans une relation circulaire. Ce qui exige d’intenses rencontres de travail et une coordination proactive pour une durée de mandat assez limitée et une feuille de route chargée. L’Energie de production serait à l’épreuve pour des missions importantes telles l’organisation de la Conférence Nationale, les réformes constitutionnelles, la révision du système des cartes d’identification nationale, l’organisation des élections…Tel serait est le défi de titan de respecter l’échéancier du 7 février 2026.
Sources bibliographiques
-Le Conseil des Ministres de la République d’Haïti, Décret portant création du Conseil Présidentiel de Transition, Le Moniteur, Spécial No 14, Port-au-Prince, 12 avril 2024
– « Accord Politique Pour une Transition Pacifique et Ordonnée », sd, sl.
-Jean Mary Aubry (1994), dynamique des groupes, Editions de l’Homme.134 p.
-Philippe Bernoux (1985), La sociologie des organisations. Initiation, Editions, Paris.382p.
Hancy Pierre (2023) « Décentralisation et participation citoyenne, un projet politique sous les décombres des pouvoirs autoritaires en Haïti », in Le National du 5 avril 2023