Tout ceci peut vous aider à comprendre comment Monsieur Moïse s’est déganté en installant tout un dispositif étatique favorable à la corruption.

Jovenel Moïse ne pouvait se permettre de combattre la corruption. De trompez-vous cher frère, ce défunt président ne pouvait pas, ne voulait pas non plus parce que non seulement il était déjà trop corrompu lui-même, mais encore il est le produit parfait de la corruption sous divers angles. Le problème ne se pose pas seulement du fait qu’il « se faisait financer » par les oligarques comme vous l’avez laissé entendre. Non, c’est plus profond que cela. D’ailleurs, il ne se faisait pas financer, mais il a été financé par eux-mêmes, parce que c’était leur petite marionnette. On devrait se demander si les « oligarques corrompus » ne l’avaient pas choisi sous la base même de sa corruptibilité.  En tout cas, il parait que, seul par la corruption qu’un inconnu, un ignare, un antipathique, comme Jovenel Moïse, qui se faisait connaitre seulement 3 mois avant le lancement de la campagne électorale pouvait gagner si facilement des élections dans lesquelles les partis politiques les plus populaires ont pris part.

L’élection de Jovenel Moïse était une mascarade purement et simplement. Une première tentative a été annulée sous la pression populaire suite à un gros soulèvement du 22 janvier 2016. On a mis sur pied une commission indépendante d’évaluation et de vérification électorale, elle a révélé que ces élections ont été frauduleuses à plus de 80%. Elle a, en conséquence, exigé leur annulation complète. Ce que l’impérialisme a empêché. Alors que suivant les observations du rapport de la CIEVE, Monsieur Moïse aurait dû tout bonnement être écarté de la course électorale pour fraudes massives à son avantage. Je vous permets de lire ce rapport dont il a été question et de l’avoir en PDF gratuitement pour votre édification :

 

https://www.alterpresse.org/spip.php?article26341

Tout compte fait, Monsieur Moïse était un Homme corrompu tant dans sa vie privée, sa vie citoyenne, que sa vie publique.  C’est ce que nous, les haïtiens, nous retenons de lui. Il n’a jamais inspiré confiance à la population. Il est juste un accident de l’histoire, malheureusement, il a été quand même président du pays de Dessalines. Un petit président hideusement célèbre, on va dire. Il est le président le plus corrompu, impopulaire et détesté de toute notre histoire de peuple.  Il est mort en ayant à son actif, pas moins d’une douzaine de massacres sur la population civile en seulement trois ans (2018-2021). Voir le site de l’organisation des droits humains :

http://www.rnddh.org , pour des informations complémentaires !

*Quelle a été la base sociale du pouvoir de Jovenel Moise*?

Le pouvoir de Moïse était sans assise réelle. C’était un pouvoir fragile et flottant dépourvu d’ancrage populaire. Toutefois, il faut le dire qu’il a été hissé frauduleusement au pouvoir par les héritiers d’Alexandre Pétion et ces oligarques dont vous avez parlé pour poursuivre, bien sûr, la politique des assassins de l’Empereur Jacques 1er, assassiné, le 7 octobre 1806. Cette politique qu’il était amenée à conduire est celle de Pétion et de Jean-Pierre Boyer (1818-1847). Une politique aristocratique, anti-peuple contre la révolution de 1804.  Jovenel Moïse était donc le « dauphin » de ce clic, de cette caste de la Ville de Pétion au XIXe siècle, aujourd’hui encore appelée : Pétion-Ville. La ville des mulâtres, héritiers des colons français et de ces syro-libanais dont vous avez fait mention. C’est cette frange-là qu’il représentait, qu’il servait habilement et juteusement à travers les ressources du pays et aux dépends de la majorité, des masses populaires en particulier. Ceci dit, Monsieur Jovenel Moïse qui vient d’être lynché la semaine dernière par son entourage n’était ni l’égal, ni légitime, ni populaire, ni même accepté par la grande majorité du peuple en haïtien. A contrario, il était décrié, rejeté, voire détesté par la quasi-totalité de la population haïtienne jusqu’à sa mort. Avant son assassinat, il a combattu sévèrement le peuple durant trois ans dans une lutte féroce et impitoyable. Il faut le reconnaitre, c’était un président sanguinaire. Cette lutte a été enclenchée à partir de la semaine 6,7,8 juillet 2018 jusqu’aujourd’hui.

Monsieur, Moїse a eu le culot de recruter des mercenaires à l’étranger pour tirer d’une balle à la tête des manifestants qui réclamaient justice lors du vaste mouvement organisé sous le slogan : « kot kòb petwo karibe a ? ». Sans compter le massacre punitif organisé contre la population de « Lassaline » en novembre 2018 où plus de soixante-dix personnes ont été tuées, mutilées et brûlées.

*Son illégalité sous divers angles*

Tercio :  Mon frère Kemi Seba, vous dites que vous pensez que Monsieur Moïse devait démissionner à cause qu’il était épinglé dans la corruption et qu’une bonne partie de la population réclamait son départ.  Evidemment, c’est le moins qu’il pouvait faire. Mais cela ne suffit pas, il fallait ajouter tout de suite qu’il était devenu, de surcroit, un président de facto depuis le 7 février 2021, suivant la constitution Haïtienne en son article 134-2 et le décret électoral de 2015. En ce sens-là, il est assassiné le jour qui lui fait exactement 5 mois de présidence hors-la-loi. Il avait des véritables velléités dictatoriales qui lui poussaient à saper tous les acquis démocratiques que nous avons faits jusque-là. Depuis janvier 2020, il dirigeait par décret. Il n’a fait aucune élection durant tous ses quatre ans passés au pouvoir. En janvier il a renvoyé le parlement, en prétextant qu’il a constaté la caducité de ce dernier. Tout en ayant une majorité confortable au parlement, il a « trainé ses pieds » pour attendre l’échéance du mandat des parlementaires pour pouvoir gouverner par décret. Par exemple, par un décret, il a décidé de changer subitement le code pénal haïtien unilatéralement ; il a constitué son propre conseil électoral, en dehors de toute norme ; il a décidé de changer par un décret la constitution du 27 mars 1987 sur laquelle il avait prêté serment. Tout ceci en vue de faire le travail de ses patrons de l’impérialisme et de ces familles prédatrices et détentrices – que vous avez relaté dans votre analyse – et qui constitue effectivement de relais entre l’Occident et ses exécutants d’Haïti.  Avant qu’il ait été assassiné, il était un véritable autocrate à la tête du pays. Car, en plus du pouvoir législatif, il a démantelé le pouvoir judiciaire en ne renouvelant pas les mandats des juges honnêtes du système judiciaire. Ce qui paralyse le bon fonctionnement du système. De surcroit, il a révoqué illégalement trois des juges de la Cour de cassation, (la cour suprême). Alors qu’ils sont inamovibles dans leur mandat suivant la loi.

*Est-ce que Jovenel Moïse combattait les oligarques* ?

Quarto :  Jovenel est trop corrompu pour prétendre vouloir combattre des oligarques corrompus. D’ailleurs, il était à leur service. Il avait lui-même avoué cela en terre étrangère. A Paris, il a dit haut et fort qu’il vient de nommer 50 juges corrompus :

https://haiti.loopnews.com/content/jovenel-moise-avoue-avoir-nomme-50-juges-corrompus.

Seul un corrupteur peut avouer avoir nommé d’un coup 50 juges corrompus dans le système judiciaire du pays qu’il gouverne. Qu’il soit bien clair pour vous, mon vieux ! Vous ne devriez pas vous leurrer sur Jovenel Moïse. Je ne sais pas à qui vous entretenez des relations en Haïti. Mais, vous n’êtes pas assez bien informé, me semble-t-il. Je ne sais pas à travers quel média vous vous informez sur Haïti non plus. Mais les informations sont là et tel que vous présentez Jovenel Moïse, nous autres haïtiens, nous voyons dans vos propos un personnage fictif. Un président sans base populaire, sans partisan, dont l’unique soutien réside en l’impérialisme occidental et son relais local ne saurait être en mesure de tenter de combattre la corruption des oligarchies. Non, ce n’est pas la vérité. Toutefois, il est à croire qu’il y a effectivement une fraction plus ou moins progressiste qu’il combattait du bec et des ongles au profit des syro-libanais. C’est bien cela la vérité. Cependant, je n’ai pas l’intention de disculper qui que ce soit. Je ne prétends pas dire que la famille Vorbe qu’il a contraint de s’exiler n’est pas corrompu. Mais ce qu’il faut dire clairement, sans implicite ni inter-dits, c’est qu’au sujet de la corruption au regard du « combat » que menait M. Moїse, il y a nécessité d’insérer beaucoup de guillemets.  Parce que si Jovenel Moise l’avait vraiment attaqué ce n’est qu’à partir d’une géométrie variable.  On est « oligarque corrompu » suivant dans quel camp l’on se situe.

Quand M. Jovenel vous dit qu’il identifie des oligarques corrompus pour les voir aussi, il faut être du même angle de vu que lui-même. Parce que, lui, il ne voyait pas tous les corrompus indistinctement. Plus la corruption est proche, plus il était invisible aux yeux de M. Moïse. Peut-être qu’il souffrait d’une cécité en matière de la corruption. On ne sait pas. C’est le moins qu’on puisse dire à son sujet. Dommage qu’il soit assassiné, il ne pourrait pas répondre, un jour, devant la justice haïtienne pour ses actes de corruption notoire. C’est bien regrettable, il ne serait pas là pour être entendu devant la cour pénale internationale pour les massacres d’État perpétrés contre les quartiers populaires qui sont catégorisés comme crime contre l’humanité.  Nous le regrettons.

Somme toute, votre manière de camper Jovenel Moїse avant même ses funérailles est loin d’être proche du personnage qui a été au timon des affaires durant ces quatre ans et cinq mois passés. Cependant, vos propos tombent d’aplomb à ceux de l’équipe des propagandistes du régime des « bandits légaux » tant en Haïti qu’à l’étranger. Mais, avec la seule différence, peut-être, c’est que, ces gens-là, ils agissent délibérément dans un cadre bien précis, à savoir : une campagne de réhabilitation de Monsieur Jovenel Moïse après son élimination par sa bande. C’est aussi ce discours que claironne une frange de la gangocratie à laquelle Jovenel Moïse appartenait. Il est clair que n’ayant pas de base populaire, il se dotait de gangs pour diriger. Or, on le sait tous que c’est comme ça que cela fonctionne dans la pratique des gangs. La mafia a ses principes propres qu’il faut savoir. Connaitre le mode opératoire et « l’éthique gangocratique » ne vous permettra-t-il pas de mieux saisir le sens et déceler les vraies causes de l’assassinat de Monsieur Moise ?

Salutations fraternelles, mon cher Kemi.

Jean Willy Belfleur
citoyen haïtien
E-mail : je***************@ro********.com

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