par Carly Dollin
Depuis les sorties en ligne, en colonne et en diagonale mal calculées, désespérées et ratées par les différentes pièces présidentielles sur l’échiquier économique pour essayer de faire avaler la couleuvre d’une augmentation spontanée de 85 gourdes sur le gallon du gazoline, la présidence a été déjà menacée de capture dans ce jeu d’échec alimenté d’hypocrisie, d’arrogance, d’indécence et de mensonges présidentiels polymorphes et multicolores.
Vendredi 15 février 2019 ((rezonodwes.com))– Les 6-7 juillet 2018 allaient marquer un coup tragique reçu par l’arrogance, l’ignorance, l’indécence et le mépris qui sont les principales pièces détenues par le régime politique en place. Asthéniques, apathiques, épuisées après les secousses du Petrochallenge, les pièces du gouvernement et de la présidence ont été quasiment toutes englouties.
Leurs prompts déplacements maladroits, mal fagotés, sans coordination, pour essayer de mitiger les risques de l’échec du régime ont été sans effet. Pour faire durer le jeu, en évitant une capture prématurée du roi, les fous, les cavaliers, les tours, la dame (soit l’équipe de la présidence) avaient décrété la permanence sur l’échiquier politique pour essayer des coups additionnels pour sortir le roi des menaces de la captivité par les joueurs en face (la population) détenteurs des pièces du courage et de la solidarité pour demander des redditions de compte et défendre du bec et des ongles l’idéologie de voir l’honnêteté, le respect des valeurs et la bonne gouvernance prendre la main et triompher sur cet espace de 27 750 km carrés habité par onze millions d’âmes humaines en quête de mieux être. Le Petrochallenge a constitué un véritable rempart face au régime en place qui était obligé de repenser ses coups, mais sans succès.
Au lendemain du 6-7 juillet, les discours présidentiels ont pris des tons et des formes versatiles. Les conclusions épicées d’une arrogance fâcheuse « Point Barre ! » se sont transformées spontanément dans une fausse gentillesse et une sagesse fallacieuse, traduite par une écoute active « Nou Pale, M Tande Nou ». Les maitres à penser de l’équipe de la population, notamment les Petrochallengers, allaient récidiver avec des coups encore plus savants, sur l’échiquier politique, les 17 octobre et 18 novembre, qui mettaient presque K.O le régime politique actuel. N’étaient quelques consultations du régime, empreintes d’anti-jeux (promesses, ententes et négociations obscures) auprès de certains joueurs politiques fort expérimentés de l’international, la partie aurait déjà touché à sa fin. Car les principales pièces de forces du régime (grands conseillers, ministres, directeurs généraux, parlementaires) ont été déjà clouées ; leurs déplacements « Crabes » accentuaient le péril et la chute de ce régime empreint d’arrogance, d’ignorance et de cupidité.
C’était un 7 Février
A l’instar du 7 février 1986, les rues de la capitale, le fameux « Highway » de Delmas, les coins et les recoins de plusieurs villes de provinces accueillaient en cette date évènementielle de l’année 2019, des dizaines de milliers de frustrés, d’oubliés et d’abandonnés dans les projets d’électricité, d’eau potable, d’hôpitaux, d’infrastructures économiques et sociales. Ces hommes, ces femmes et ces jeunes trop bafoués, ridiculisés et ironisés par les « laideurs » politiques, sont réveillés de leur léthargie pour réclamer, monsieur le président, pas des sachets de riz, des bidons d’huile, des cubes, du sel, ce qui est un affront de plus de votre part. Personne ne doit jouer avec la dignité de ce peuple vaillant, courageux, résilient, victime de l’escroquerie financière des coopératives et des caisses populaires en 2003 et du séisme cruel du 12 janvier 2010, mais qui s’est tenu debout en dépit de la myopie et de l’absence de leadership de ses dirigeants.
La toile de fond des revendications populaires, vous le savez « bien propre » est la fin de la corruption, de l’indécence, de l’arrogance, de l’incompétence et des multiples mensonges, soit la marque de fabrique du régime en place dont vous êtes aujourd’hui le chef de file, ou un très bon serviteur.
La population a définitivement compris qu’Haïti ne puisse renaître des cendres nauséabonds engendrés par l’administration actuelle si des corrections drastiques ne sont pas apportées aux gabegies administratives et aux malversations enregistrées dans les fonds PetroCaribe, les dollars cinquante de la diaspora, etc. La fin des collusions déloyales entre les firmes d’exécution et les firmes d’expertise, la gestion efficace et transparente des directions générales, des ministères et des organismes autonomes, capables de générer des centaines de millions de dollars au profit de la jeunesse, de la santé, de l’éducation, du sport…, apparaissent en gras dans les desiderata du peuple haïtien qui exige avec véhémence le divorce d’avec l’enrichissement illicite d’un clic au détriment de onze millions d’âmes en quête de bonheur.
Le vin est tiré
En dépit des anti-jeux du régime, avec des promesses fallacieuses allant de l’électricité 24h/24, la nourriture dans les assiettes et l’argent dans les poches jusqu’à la construction d’un téléphérique et de multiples ports et aéroports internationaux, l’échec est imminent. A force de faire des promesses sans tenir compte de leurs conséquences, le président a permis à des académiciens des réseaux sociaux d’inventer, à juste titre, des néologismes utilisant son propre nom et qui sont associés au mensonge et à la tromperie. Amant de l’innovation et de la technologie, si ce n’est un mensonge de plus, nous sommes certains que le vocable joveneliser, avec toutes ses déclinaisons, a déjà atteint le portable présidentiel.
La présidence a eu à sa disposition des pièces à longue portée : des tours, des chevaliers, des fous, une dame (l’équipe du pouvoir). Pourtant, dans son insensibilité, sa boulimie et son amateurisme administratif et politique, atavisme hérité de la même cohorte du 7 février 2011, connectée avec la présidence par les liens politiques bien tissés, monsieur JOMO semble avoir joué au « qui perd gagne », entrainant ainsi le suicide politique de son propre régime. En voulant tout pour un camp déjà très illégitime, et rien pour les autres, la présidence a tout hypothéqué. Pourtant, ce jeu d’échec aurait pu être transformé en un jeu intelligent de coordination et de coopération amicale où toutes les équipes auraient gagné et sortiraient pleinement satisfaites. Au lendemain de la prise de fonction de ce régime vulnérable, de nombreux partis politiques de l’aile dure et de l’aile moins radicale de l’opposition auraient dû être invités à intégrer le pouvoir pour mieux travailler et présenter une meilleure offre politique et économique à Haïti ; ce qui aurait conféré une meilleure image et apporté une énorme valeur ajoutée à la légitimité de ce régime précaire.
Au lieu de reconnaitre la force et la compétence des acteurs en face, la présidence avait très tôt déclaré des hostilités en les humiliant et les écartant tout bonnement des affaires du pays ; exactement le même comportement du prédécesseur. Donc, aucune leçon n’a été tirée pour éviter de réitérer les erreurs du passé. Pourtant, dans les coups intelligents, il faut savoir jouer les cartes de la concession, du partage et du respect de l’équipe en face. Sinon, vous pouvez tomber dans le piège du zugzwang[1] de ne pouvoir sortir aucune pièce à votre disposition pour sauver votre peau. Ce n’est pas sans raison que René Préval a été considéré comme un grand stratège politique, même si en fait les intérêts du pays n’avaient pas toujours la primauté. Mais ce seul président Haïtien avec deux mandats complets accomplis, a su jouer le franc jeu et sortir en permanence la carte de la négociation avec les acteurs politiques de tout horizon.
Au lieu de se laisser imprégner par la sagesse politique, la présidence actuelle a emprunté exactement le chemin de son prédécesseur, animé d’un orgueil aveugle et étouffant. En nous appuyant sur les résultats choquants accouchés par le régime politique en place, l’hypothèse selon laquelle l’arrogance, l’ignorance et l’incompétence sont des fruits de l’orgueil semble se confirmer en Haïti avec cette équipe atterrissant comme des extraterrestres dans les affaires nobles d’un pays si fier dans le temps.
Pour essayer d’éviter cet échec et mat cuisant, les grands leaders et les myopes conseillers du régime ont commis l’erreur irréparable de proposer des sacs de riz à la population pour la calmer et invité trop tardivement les acteurs de l’opposition à une nouvelle partie pour recommencer le jeu, déjà en cours. Même avec un arbitrage maison, il parait quasiment impossible pour ce régime de sortir de cette ornière politique. Le timing n’est définitivement plus approprié.
La présidence semble se leurrer dans un complexe de thanatophobie reflété dans l’adage « Pa kite kabrit fi’n pase, pou ap rele ann fèmen baryè » ?
Semble-t-il qu’une nouvelle partie doit commencer avec des joueurs loyaux, compétents, dignes et sages, à trier sur le volet, en fonction de leur background académique, politique et social pour remettre à l’heure les pendules de l’honnêteté, de la dignité, de la justice, de la sécurité, de la stabilité et de la richesse.
Carly Dollin
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