Les commissaires du gouvernement concernés par la dernière décision du ministère de la Justice et de la Sécurité publique peuvent défaire leurs bagages. Le ministre de la Justice et de la Sécurité publique a suspendu la décision de les transférer. Le report des élections et la gestion de la crise postouragan sont les principales raisons avancées par le ministre pour expliquer son rétropédalage. « Il est porté à la connaissance de tous les commissaires du gouvernement concernés par la mesure administrative de rotation, prise dans le cadre du processus électoral, qu’elle est suspendue jusqu’à nouvel ordre, en raison de la gestion de la crise postcyclonique et du report du scrutin, préalablement prévu pour le 9 octobre», écrit le ministre dans une circulaire.
Le ministre de la Justice invite tous les commissaires du gouvernement en question «à regagner rapidement leurs parquets respectifs en attendant de nouvelles instructions». Plusieurs commissaires du gouvernement ont été transférés d’une juridiction à une autre, particulièrement à Jacmel, Petit-Goâve, au Cap-Haïtien, à Port-au-Prince. Ce dernier avait suscité des vagues de dénonciations compte tenu du fait que la décision du ministre était intervenue peu de temps après que le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince eut interdit la tenue du festival homosexuel, Massi-Madi. Le sénateur Jean Renel Sénatus, l’un de ceux qui avait exprimé leur soutien à Jean Danton Léger et qui avaient demandé au ministre de revenir sur sa décision, n’a pas caché sa joie après l’annonce du revirement de Camille Édouard Junior. « Pour victoire, c’en est une! Danton reste à son poste. Vive la famille !», s’écrie le sénateur sur sa page Facebook.
Une guerre ouverte sur Facebook
Les deux hommes se sont livrés à des échanges virulents sur le réseau inventé par Mark Zukerberg. « Pour votre édification, je vous informe que le commissaire Léger n’était pas transféré à cause de la mesure prise contre le festival Massi-Madi. Il faisait partie d’une liste de plusieurs commissaires qui devaient avoir une nouvelle affectation dans le cadre d’une mesure administrative de rotation à partir de plusieurs réunions avec les partis politiques qui réclamaient des mesures en vue de renforcer la neutralité, l’impartialité et la sérénité dans le processus électoral», a précisé le ministre en s’adressant directement au sénateur sur son mur.
Une séance de travail avait été prévue entre le ministre de la Justice et la commission Justice et Sécurité du Sénat. Une séance qui n’a pas eu lieu à cause du passage de l’ouragan Matthew. Le ministre espérait apporter les informations nécessaires au regard de ces mesures, a-t-il fait savoir dans son post avant de tacler sévèrement l’ex-commissaire du gouvernement de Port-au-Prince. «Je vous écris, comme rarement je le fais sur les réseaux, pour vous informer que c’est dangereux en tant qu’homme public de publier un texte sans la signature de l’autorité administrative concernée», tance Camille Édouard Junior qui en a eu également pour son compte.
« Sincèrement, je ne vous comprends pas Monsieur le Ministre», écrit Jean Renel Sénatus, estomaqué. « Après votre vaine tentative de m’intimider, vous pensez maintenant que vous êtes en droit de me faire la leçon?», rouspète-t-il sur sa page Facebook également. L’ancien commissaire du gouvernement qui s’est fait une réputation en luttant contre l’exploitation sexuelle des mineurs et la présence des enfants dans les boîtes de nuit revient à la charge et n’a vraiment pas l’air d’apprécier les remontrances du ministre. « Vous avez frappé, Monsieur le ministre, à une très mauvaise porte. J’ai pas à lutter contre votre personne et je vous l’apprends aujourd’hui. Je n’ai nullement pas l’intention de vous envier pour quoi que ce soit non plus. Je vous apprends que je ne suis pas candidat et après mon mandat je rentre en mon cabinet contrairement à ce que vous faites véhiculer sur ces réseaux que vous détestez. Haïti est mon pays, je peux livrer bataille à n’ importe qui pour la consolidation de ses familles», lui a-t-il fait savoir.
Dans son post, Jean Renel Sénatus a mis en question la respectabilité du ministre de la Justice et de la Sécurité publique. « Les autorités doivent se respecter pour mériter le respect des dirigés. Vous aviez offert quelque chose à ma société que je n’accepterais même à ma dernière goutte de sang et c’est à ma conviction», tempête l’ex-commissaire du gouvernement qui a été surnommé Zokiki. Énervé et offusqué, le sénateur se dit prêt à affronter le ministre et ne se laissera pas faire. « Voulez-vous vous en prendre à moi? Je suis prêt à assumer toutes les conséquences. Et désormais ministre n’essayez plus de me faire la leçon. Faites-le de préférence à vos subalternes. J’ attends le kidnapping», a-t-il clairement indiqué.
Danton Léger fait amende honorable
Tandis que le sénateur et le ministère se déclarent la guerre, le commissaire a accepté lui de présenter des excuses à son supérieur hiérarchique. « Je vous présente mes compliments et tiens par la présente à vous adresser mes plus profonds regrets en raison de certains propos malheureux retransmis dans la presse et constituant des actes d’insubordination et un manquement flagrant au respect dû par tout commissaire du gouvernement à son autorité hiérarchique, en la personne du ministre de la Justice et de la Sécurité publique», écrit le commissaire du gouvernement Jean Danton Léger dans une lettre adressée le 5 octobre au ministre de la Justice Camille Édouard Junior.
Le commissaire du gouvernement, qui désormais restera à Port-au-Prince, dit comprendre que la décision de procéder à son transfert et de plusieurs autres commissaires du gouvernement qui rentre dans le cadre des attributions légales du ministre a pour but de renforcer la neutralité durant le processus électoral. Jean Danton Léger a promis de travailler aux côtés du ministre avec la «détermination inlassable» et la «dextérité inouïe» qu’on lui connaît. Le ministre de la Justice pourra aussi désormais compter sur l’apport de sa contribution à la « distribution d’une justice juste, saine, impartiale et équitable dans la juridiction».
Danio Darius source le nouvelliste