La commission présidentielle pour la réforme de la justice a présenté vendredi l’avant-projet du nouveau Code pénal aux agents judiciaires de la juridiction de Port-au-Prince. Il s’agissait surtout pour la commission de recevoir les remarques et les propositions de ses invités sur le document qui doit remplacer l’actuel Code pénal vieux de 179 ans.
« L’édifice pénal est secoué, il est ébranlé, fissuré et menacé de ruine. Nous avons un Code pénal totalement dépassé, un code qui devient un instrument d’insécurité juridique », a déclaré maître Jean Vandal en présence d’un échantillon représentatif de la basoche, réuni au Karibe Convention Center. Les propos du membre de la commission présidentielle pour la réforme judiciaire interpellent et sonnent en faveur de la réforme. « Il est de toute nécessité et de toute urgence que ce code soit refondu, qu’il y ait un travail en profondeur pour une orientation nouvelle des dispositions du code », a martelé Me Vandal qui partage ainsi les préoccupations de tout le système judiciaire.
Après avoir parcouru les différentes juridictions judiciaires du pays, la caravane de la commission présidentielle pour la réforme de la justice a fait escale à Port-au-Prince. Objectif : recueillir les remarques des agents judiciaires sur l’avant-projet du nouveau Code pénal. En présence du ministre de la Justice, Pierre-Richard Casimir, des magistrats, des avocats, la commission présidentielle pour la réforme judiciaire a présenté les grandes lignes de ce qui devra être le nouveau Code pénal haïtien. Une initiative qui fait partie du travail d’appropriation du nouveau Code pénal par les acteurs du système judiciaire.
« Il y a 179 ans depuis qu’Haïti avait adopté un Code pénal, 179 ans dans la vie d’un pays, c’est très long, la société bouge, le monde évolue, il y a de nouvelles infractions, de nouvelles attitudes, de nouveaux défis, a soutenu le ministre de la Justice et de la sécurité publique, Pierre Richard Casimir, en marge de la rencontre. Il était temps, il était important pour un chef d’État, conscient du problème, de faire appel à des professionnels du droit », a poursuivi le ministre qui salue le travail de la commission présidentielle.
La commission présidentielle pour la réforme judiciaire, aidée par le groupe Magloire, a procédé à une refonte totale du Code pénal de 1836. Quatre grandes opérations ont été faites sur le texte qui ne convient plus à la réalité actuelle. Dépénalisation, pénalisation, codification et réécriture, ces quatre grandes interventions résument méthodologiquement le travail réalisé par la commission pour parvenir au nouveau document remis en mars dernier au président de la République.
Le nouveau Code pénal sera fondé sur le respect des droits humains contrairement au code de 1836 axé beaucoup plus sur les châtiments. C’est ainsi que certaines peines ont été extraites du nouveau Code pénal. « Il ne s’agit plus d’écraser l’individu, aujourd’hui on s’oriente vers la réhabilitation pour rester dans le cadre des différentes conventions que nous avions ratifiées dans la nouvelle dynamique des droits humains », a déclaré Me Jean Joseph Exumé, président de la commission. Selon Me Exumé, la peine d’emprisonnement n’est plus la règle. Dans le nouveau Code pénal, le tribunal pourra utiliser des peines alternatives pour remplacer la peine d’emprisonnement.
La commission est venue également avec de nouvelles infractions. On cite des infractions liées à la cybercriminalité, à la criminalité transnationale, le crime contre l’humanité, le génocide. Les crimes et délits résultant de fichier ou de traitement informatique. « Nous ne pouvons pas faire autrement, aujourd’hui, nous essayons de rattraper un retard de 179 ans. Nous ne pouvons qu’intégrer dans le nouveau Code pénal toutes les infractions nouvelles », a expliqué le président de la commission qui a évoqué également les traités et conventions signés par Haïti. « Nous vivons dans un monde en pleine mutation et envisager la réforme, la modernisation du Code pénal c’est sauter deux siècles et se projeter dans l’avenir », a dit, pour sa part, la vice-présidente de la commission, l’avocate Sibylle Théard Mevs.
C’était la cinquième rencontre de ce genre organisée par la commission présidentielle pour la réforme de la justice, soutenue par le ministère de la Justice et de la Sécurité publique. Après avoir reçu les remarques et les propositions des cinq juridictions judiciaires et de la société civile, la commission promet de réviser et considérer ces propositions issues des différents ateliers. Certaines seront adoptées et intégrées dans le nouveau Code pénal.
Louis-Joseph Olivier
Source Le NOuvelliste